01 mai 2006

Embrassez qui vous voudrez...

(Embrassez qui vous voudrez, un film de Michel Blanc, 2002)

Bien sûr, c’est bien filmé, bien scénarisé, bien interprété (et Carole Bouquet n’est pas ‘que’ belle, elle nous éblouit de talent), mais on aimerait dire un peu, avant de faire joujou à la critique, qu’à la base c’est le genre d’adaptation sans inspiration, qui en dit long sur la morale étriquée du monde du cinéma.

Un bon scénar n’a pas forcément de morale, et celle-ci ne doit pas être toujours sauve à la fin. Mais en portant à l’écran ce vaudeville sexuel, magnifiquement réalisé d'ailleurs, autant dire qu’on souhaite parler d’un panel de gens inintéressants et de leur monde étouffant. Qu’on n’en sort pas de cette vision sans cervelle et inconsistante des relations amoureuses.

Difficile en effet de parler de comédie de mœurs quand il n’y a pas de dérision, pas de recul. On part du début, avec un groupe de gens qui ne savent ni aimer, ni vivre, qu’on voudrait prendre pour des humains, et on est à l’arrivée avec les mêmes, ni plus ni moins humains.

Le film a ce paradoxe en effet que, si les interprétations sont toutes excellentes, les plans, les enchainements, et les émotions artistement tissées sur les visages, la nôtre d’émotion n’y est pas. A aucun moment on n’a envie de plaindre ces personnages, ni de les aimer, ni de s’immiscer dans leurs problèmes. Cette fresque d’amours instables, de fantasmes inavoués, le tout présenté par les mêmes, de la même façon, n’innove rien sur ce qu’on a vu depuis des années. Une seule chose : le sexe à l’origine de tout, et comme réponse à tout. Bonjour l'angoisse.

A croire que le réalisateur a décidé de ne pas aller au-delà du fantasme de l’échangisme, et qu’avec ces chassés-croisés, ces quiproquo, ces duplicités d’acteurs, il se soit trompé et ait voulu faire une pièce bouffonne. A croire que, si de tels êtres existent dans la vie, plus faciles à deviner les uns que les autres, immatures, mais cohérents, il soit préférable de ne jamais aller au bout de leur psychologie, au bout de leur logique, de les laisser s’envoyer des vannes à longueur de temps, et avoir toujours raison. Où est l’intérêt ? Où est la distanciation, le regard de l’artiste ? Sans sortie de secours, cette ronde de Français malsains nous frôle, elle ne nous atteint pas. Un peu comme une caricature, mais on ne sait pas de quoi.


Il manque quelque chose, quelque chose de central à ce film.
Quelque chose de vivant.
L’histoire ?

Quand les résumés vous disent : c’est l’histoire de couples à la dérive qui s’emmêlent, on est certes, bien avancé. Quand on ajoutera que c’est une satire, une comédie de mœurs, une critique acide de la vie conjugale, de l’amour fugace, des amours, on s’éloigne de la réalité. Quand Dutronc essaie d’expliquer ce qu’est le désastre d’un mariage décomposé et usé - voilà l’un des propos innovants du film - on a envie de le croire... Mais sa réponse sonne si creux, si commune, qu’elle en est presque ridicule.

Embrassez qui vous voudrez...

Mais a-t-on le choix, un vrai choix ?

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